Il n’est pas facile de se faire connaître sur Internet, et encore moins référencer, quand on est un petit restaurant de quartier et que le budget que l’on peut allouer au marketing est limité. Le manque de connaissances sur le marketing numérique voire d’intérêt peut amener les petits restaurateurs à perdre pied sur ce qui est maintenant essentiel pour le futur de leur métier.
UNE INDUSTRIE QUI CHANGE
On constate que l’industrie de la nourriture a complètement changé avec le temps, le bouches à oreilles s’atténue pour laisser place aux recommandations sur TikTok et Instagram. Les potentiels clients vont chercher à avoir un accès au menu avant même de se rendre sur place mais aussi un visuel des différents plats proposés afin de se faire une idée en amont de ce que le restaurant propose.
On assiste aussi à l’instagrammisation des restaurants, où les clients vont chercher à aller dans tel ou tel restaurant pour la beauté du lieu et la qualité des stories qui pourront être faites. Le #splendidomarseille sur Instagram recense presque plus de photos des toilettes du restaurant que de la nourriture proposée, ce restaurant est donc plus connu pour son esthétique que pour sa mission première.
Le restaurant marseillais du groupe Big Mamma a fêté ses deux années d’ouverture en mars dernier, on ne comptait plus les contenus sur les différents réseaux sociaux montrant le luxe du lieu mais on ne parlait que très peu de sa cuisine italienne. Le restaurant a bénéficié de la réputation du groupe déjà établi aux quatre coins du continent et de sa présence accrue sur les différents canaux d’acquisition : site web référençant tous les restaurants et présentant leur univers, comptes Instagram par pays et contenu diversifié allant au-delà de la simple restauration. Alors comment faire face à ces géants de la restauration qui modifie notre manière de consommer et de se restaurer ?
CONCURRENCER LES PLUS GROS
Les petits restaurateurs n’ont pas les mêmes capacités d’accueil et ne vont donc pas chercher à attirer autant de consommateurs mais ils ont besoin de se faire voir et connaître. Marc Benetrix, président des bars et brasseries de l’Union des Métiers et de l’Industrie de l’Hôtellerie de Marseille (UMIH13) et patron du restaurant La Cachette dans la même ville, situé à quelques pas du Splendido a peiné à comprendre l’utilité du marketing numérique et l’importance d’être vu en ligne. Le restaurant bénéficierait d’un recensement organique fort et d’un site web proposant les différents services : privatisations, tablées de plus de 10 personnes, proposition de menu ou encore soirée sur la terrasse. Or, cela représente un coût et une expertise que les employés n’ont pas, Marc a récemment fait appel aux services d’une community manager pour gérer ses réseaux sociaux et répondre aux commentaires Google mais il cherche maintenant à se diversifier en proposant des soirées corporatives pour la saison des fêtes. Malheureusement, cela s’avère compliqué sans site web de faire valoir ce service.
Un site web peut coûter vite cher et sans les connaissances pour le développer, cela n’a que très peu d’intérêt pour l’entreprise. Une solution alternative, en plus de respecter les valeurs du restaurant, serait l’éco-conception avec un hébergement vert qui allégerait le site et permettrait d’augmenter le SEO et faire en sortes que le restaurant se fasse connaître et se retrouve en haut des possibles recherches. D’autant plus que La Cachette a bien trouvé son nom, le restaurant est niché sur une place entre deux axes passants de la cité phocéenne et n’est pas facilement trouvable si l’on ne connaît pas la ville.
Le cas de Marc n’est pas anodin et peut s’appliquer à beaucoup de restaurateurs marseillais et d’ailleurs, il devient de plus en plus dur de se démarquer des rouleaux compresseurs qui savent joueur avec les codes du numérique que cela soit sur les réseaux mais aussi sur les moteurs de recherche, ce qui rend primordial le marketing numérique pour les plus petits.
Ainsi, pour beaucoup de petits restaurants, le marketing numérique et la création de site web est vue comme une contrainte afin de pouvoir exercer leur profession et ne représente guerre une plus-value pour eux. Les coûts importants et le manque de connaissance, d’impact direct sur leur activité rend le tout un peu difficile à digérer pour les patrons de cette industrie si particulière.
De plus, une analyse accrue des données ne serait pas représentative, actuellement, dans le cas de La Cachette car Marc n’a pas encore de site de réservations et ne compte pas en faire dû aux coûts trop élevés de création et d’entretien en comparaison avec les revenus que cela pourrait générer à l’arrivée.
CONCLUSION
Le marketing numérique est en train de devenir une norme pour énormément d’industrie mais malheureusement dans un domaine où l’humain et la convivialité priment, il en devient dommage que cela soit le paraître qui prenne le dessus. Qu’un restaurant soit plus connu pour la décoration de ses toilettes que pour la cuisine proposée parce que cela marche sur Instagram semble poser un problème. Notamment car de l’autre côté, d’autres petits restaurateurs essaient de vivre de leur passion sans tomber dans les travers du numérique et continuent de proposer une cuisine authentique plutôt qu’esthétique.
En plus de ne pas avoir les codes pour plaire sur les réseaux, les plateformes qui pourraient leur être utiles représentent un gros investissement par rapport aux revenus annuels que cela engrangerait, rendant le tout un peu trop complexe et coûteux. Bien que de nouveaux joueurs de l’industrie du web, moins chers et plus durables, émergent, l’essence même de la restauration traditionnelle aurait tendance à se perdre si tout passait au numérique, surtout pour les petits joueurs.
Mais comme Marc l’a souligné lors de notre échange, il arrivera bien un jour où les restaurants “Instagram” n’auront plus la côte et où on l’on se rendra compte que la restauration est un vrai métier de passion et non juste une belle assiette colorée posée au coin d’une table pour plaire à ses followers.
Dans un monde où le numérique prend de plus en plus de place, il paraît essentiel de garder le peu d’humanité qu’il nous reste et de garder le lien avec nos restaurateurs locaux, même s’ils ne sont pas instagrammables.
BIBLIOGRAPHIE
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